« Papa loves mambo ! » fit-elle en se dandinant en sous-vêtements.

Elle attrapa un chemisier en satin beige dans son placard, avec une jupe assortie. Elle s'habilla rapidement, et s'installa à sa coiffeuse, continuant de chantonner sa chanson préférée.

Elle sortit son eye liner et traça un trait fin sur ses paupières, et peaufina encore son regard de biche avec un mascara. Puis elle sortit le fameux rouge à lèvres, fit une bouche pulpeuse devant le miroir, et écrasa la mine du crayon, recouvrant ses lèvres d'une épaisse couche de rouge vif. Elle prit un petit mouchoir et essuya les coins de ses lèvres, où le maquillage pouvait dépasser.

Puis elle défit ses bigoudis, laissant tomber de belles boucles noires bien dessinées. Elle y passa sa brosse, et mit des épingles ainsi que du gel.

Pour finir sa préparation, la jeune femme s'orna d'un magnifique collier de perles. Elle se regarda dans le miroir en souriant de satisfaction face au tableau final, tel un artiste qui venait enfin de peindre le dernier détail sur sa toile. La jeune femme se contemplait.

Elle se leva, et rejoint alors le petit salon, où elle semblait être attendue.

« Madame Randall ! Ma servante ne vous a toujours pas amené une tasse de thé ? Quelle idiote ! Excusez-moi pour l'attente, je me suis levée un peu retard et...bien, vous connaissez ma coquetterie, il me faut du temps pour m'apprêter ! »

La pétillante jeune femme s'assit  à côté de Madame Randall, qui se contentait de lui sourire poliment, patientant sur le sofa importé de Chine, les londoniens trouvant chic tout ce qui pouvait être exotique.

A côté de cette femme élégante et extravagante, Madame Randall semblait sobre, voire même terne, mais non sans élégance. Elle avait l'habitude de prendre une tasse de thé avec Madame Pritch, qui était une femme, ou plutôt une épouse, très riche de Londres. Une femme ayant du pouvoir parmi les femmes, et dont le mari était un financier des travaux d'une petit église construite non loin de Londres.

Elles discutaient une heure environ, puis se quittaient. Madame Pritch appréciait son interlocutrice, principalement du fait qu'elle était très silencieuse et écoutait tout ce qu'elle disait. C'était pour elle une amie, une confidente, bien qu'elle n'allait pas jusqu'à lui raconter ses histoires d'amants de la veille...

Madame Randall était pour elle une part de douceur, de bienveillance dans une capitale où tout était question d'élitisme et d'apparence. Et surtout, Madame Pritch se trouvait bien plus belle qu'elle et n'avait pas peur qu'elle soit une rivale !

Passant ses ongles vernis dans ses belles boucles, Madame Prtich continuait de parler des voyages de son mari en Inde, en Afrique, montrait son nouveau tapis qu'on lui avait offert, parlait de la dernière comédie de théâtre qu'elle était allée voir...

Et Madame Randall était attentive, écoutant avec bienveillance et un sourire toujours des plus polis.

Puis quand la grande aiguille du pendule accroché au mur se mit à émettre un petit bruit métallique, annonçant l'heure écoulée, Madame Pritch posa sa tasse dans sa coupelle, et se leva en même temps que Madame Randall. Elles se firent la bise de manière chaleureuse, et Madame Pritch raccompagna son amie à la porte, en lui souhaitant de bien se porter et priant qu'elle revienne vite pour une nouvelle tassé de thé passée ensemble.

La porte se referma derrière Madame Randall. Elle vint poser son chapeau délicatement sur sa tête, et se figea un instant sur le pas de la porte, pensante.

« Whore. » dit-elle dans un souffle à peine audible.

Puis elle s'éloigna de la porte, d'un air soulagé.