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 [Histoire Courte 1] Cette étrange sensation

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Stephen L. WarnerStephen L. Warner
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MessageSujet: [Histoire Courte 1] Cette étrange sensation   [Histoire Courte 1] Cette étrange sensation Icon_minitime1Sam 24 Oct - 23:02
Ecoutez donc ce fond sonore pendant que vous lisez :)

Une sensation étrange

Horizon:

Après dîner, nous remontâmes sur le pont du navire. Devant nous, l'Atlantique n'avait pas un frisson sur toute sa surface, et une grande lune calme éclairait.
Le fière bateau glissait, lançant sur le ciel, qui semblait ensemencé d'étoiles, un gros serpent de fumée noire; et,  derrière nous, l'eau toute bleu et blanche, agitée par le passage rapide du lourd navire, moussait, semblait se tordre, remuait tant de clartés qu'on eût dit que la lumière bouillonnait.
Nous étions là, cinq ou six, silencieux, admirant, l'oeil tourné vers l'Amérique lointaine où nous allions, autour d'un verre dans un compartiment du navire
Les Marins:

Le capitaine, qui fumait un cigare au milieu de nous, reprit soudain la conversation:

-"Oui, j'ai eu très peur ce jour là. Mon bateau est resté six heures avec ce roc dans le ventre, battu par la mer.  Heureusement que nous avons été recueillis, vers le soir, par un pêcheur anglais qui nous aperçut."

Alors un grand homme avec de nombreuses cicatrices, à l'aspect sombre et mystèrieux, un de ces hommes qu'on sent avoir traversé de vastes contrées inconnus, au milieu de dangers incessant, et dont la pupille tranquille semble garder, dans sa profondeur, quelque chose des paysages étranges qu'il a vus... Il parla pour la première fois:

L'homme pâle:

-"Vous dites, capitaine, que vous avez eu peur, je n'en crois rien. Vous vous trompez sur le mot et sur la sensation que vous avez éprouvée. Un homme vigoureux n'a jamais peur en face du danger pressant. Il est ému, agité, anxieux. Mais la peur c'est autre chose.."

Le capitaine retorqua en riant:

-"Diantre! Je vous réponds bien que j'ai eu peur, moi."

Alors l'homme au teint pâle prononça d'une voix lente:

-"Je vais m'expliquer ! La peur, et les hommes les plus courageux peuvent ressentir cette sensation, c'est quelque chose d'atroce, une sensation effroyable, comme une décomposition de l'âme, un spasme affreux de la pensée, dont le souvenir seul donne des frissons d'angoisse. Mais cela n'a pas lieu, quand on est brave, ni devant une attaque, ni devant la mort inévitable, ni devant toutes les formes connues de danger: cela a lieu dans certaines circonstances anormales, sous certaines influences mystèrieuses, en face de risques vagues.
La vraie peur, c'est quelque chose comme un rappel des terreurs fantastiques d'autrefois.  Un homme qui croit aux revenants, et qui s'imagine apercevoir un spectre dans la nuit, doit éprouver la peur en toute son épouvantable horreur.
Moi j'ai deviné la peur l'hiver dernier, par une nuit de décembre.
Et, pourtant, j'ai traversé bien des periples, bien des dangers qui semblaient mortelles. Je me suis battu souvent. J'ai été laissé pour mort par des voleurs. J'ai été condamné, comme insurgé, à être pendu en Asie, et jeté à la mer du pont d'un navire sur les côte d'Angleterre.

Mais la peur, ce n'est pas cela.

Je l'ai ressenti il y a peu. C'était l'hiver dernier, dans une forêt du nord-est de la France. La nuit vint deux heures plus tôt, tant le ciel était sombre. J'avais pour guide un fermier qui marchait à mon côté, par un tout petit chemin, sous une voûte de chênes dont le vent déchaîné tirait des hurlements. Entre les cimes, je voyais courir des nuages en déroute, des nuages qui semblaient fuir devant une épouvante. Parfois, sous une immense rafale, toute la forêt s'inclinait dans le même sens avec un gémissement de souffrance ; et le froid m'envahissait, malgré mon pas rapide et mes chaud vêtement.

Nous devions souper et coucher chez un garde forestier dont la maison n'était plus éloignée de nous. J'allais là pour chasser.

Le fermier, parfois, levait les yeux et murmurait : "Triste temps !". Puis il me parla des gens chez qui nous arrivions. Le père avait tué un brigand deux ans auparavant, et, depuis ce temps, il semblait sombre, comme hanté d'un souvenir. Ses deux fils, mariés, vivaient avec lui.
La cabane:
Les ténèbres étaient profondes. Je ne voyais rien devant moi, ni autour de moi, et toute la branchure des arbres entre-choqués emplissait la nuit d'une rumeur incessante. Enfin, j'aperçus une lumière, et bientôt mon compagnon heurtait une porte. Des cris aigus de femmes nous répondirent. Puis, une voix d'homme, une voix étranglée, demanda : "Qui va là ?". Mon guide se nomma. Nous entrâmes. Ce fut un inoubliable tableau.

Un vieil homme à cheveux grisonnant, à l'oeil fou, le fusil chargé dans la main, nous attendait debout au milieu de la cuisine, tandis que ses deux fils, armés de haches, gardaient la porte. Je distinguai dans le coin deux femmes à genoux, le visage caché contre le mur.

On s'expliqua. Le vieux remit son arme contre le mur et ordonna de préparer ma chambre ; puis, comme les femmes ne bougeaient pas, il me dit brusquement :

- Voyez-vous, Monsieur, j'ai tué un homme, voilà deux ans, cette nuit. L'autre année, il est revenu m'appeler. Je l'attends encore ce soir.

Puis il ajouta d'un ton inquiétant :

- Aussi, nous ne sommes pas tranquilles.

Je le rassurai comme je l'ai pus, heureux d'être venu justement ce soir-là, et d'assister au spectacle de cette terreur superstitieuse.

Je racontai des histoires, et je parvins à calmer à peu près tout le monde.
Près du foyer, un vieux chien, presque aveugle, un de ces chiens qui ressemblent à des gens qu'on connaît, dormait le nez dans ses pattes.
Le vieux chien:

Au-dehors, la tempête acharnée battait la petite maison, et, par un étroit carreau, une sorte de judas placé près de la porte, je voyais soudain tout un fouillis d'arbres bousculés par le vent à la lueur de grands éclairs.

Malgré mes efforts, je sentais bien qu'une peur profonde tenait ces gens, et chaque fois que je cessais de parler, toutes les oreilles écoutaient au loin. Las d'assister à ces craintes imbéciles, j'allais demander à me coucher, quand le vieux garde tout à coup fit un bond de sa chaise, saisit de nouveau son fusil, en bégayant d'une voix égarée : "Le voilà ! le voilà ! Je l'entends !". Les deux femmes retombèrent à genoux dans leurs coins en se cachant le visage ; et les fils reprirent leurs haches. J'allais tenter encore de les apaiser, quand le chien endormi s'éveilla brusquement et, levant sa tête, tendant le cou, regardant vers le feu de son oeil presque éteint, il poussa un de ces lugubres hurlements qui font tressaillir les voyageurs, le soir, dans la campagne. Tous les yeux se portèrent sur lui, il restait maintenant immobile, dressé sur ses pattes comme hanté d'une vision, et il se remit à hurler vers quelque chose d'invisible, d'inconnu, d'affreux sans doute, car tout son poil se hérissait. Le garde, livide cria : "Il le sent ! il le sent ! il était là quand je l'ai tué". Et les deux femmes égarées se mirent, toutes les deux, à hurler avec le chien.

Malgré moi, un grand frisson me courut entre les épaules. Cette vision du chien dans ce lieu, à cette heure, au milieu de ces gens rendu fou, était effrayant à voir.

Alors, pendant une heure, le chien hurla sans bouger ; il hurla comme dans l'angoisse d'un rêve ; et la peur, l'épouvantable peur entrait en moi ; la peur de quoi ? Le sais-je ? C'était la peur, voilà tout.

Nous restions immobiles, dans l'attente d'un événement affreux, l'oreille tendue, le coeur battant, bouleversés au moindre bruit. Et l'animal se mit à tourner autour de la pièce, en sentant les murs et gémissant toujours. Cette bête nous rendait fous ! Alors, le paysan qui m'avait amené, se jeta sur elle, dans une sorte de terreur furieuse, et, ouvrant une porte donnant sur une petite cour jeta l'animal dehors.

Il se tut aussitôt ; et nous restâmes plongés dans un silence plus terrifiant encore. Et soudain tous ensemble, nous eûmes une sorte de sursaut : un être glissait contre le mur du dehors vers la forêt ; puis il passa contre la porte, qu'il sembla tâter, d'une main hésitante ; puis on n'entendit plus rien pendant deux minutes qui firent de nous des insensés ; puis il revint, frôlant toujours la muraille ; et il gratta légèrement, comme ferait un enfant avec son ongle ; puis soudain une tête apparut contre la vitre du judas, une tête blanche avec des yeux lumineux comme ceux des fauves. Et un son sortit de sa bouche, un son indistinct, un murmure plaintif.

Alors un bruit formidable éclata dans la cuisine. Le vieux garde avait tiré. Et aussitôt les fils se précipitèrent, bouchèrent le judas en dressant la grande table qu'ils assujettirent avec le buffet.
Et je vous jure qu'au fracas du coup de fusil que je n'attendais point, j'eus une telle angoisse du coeur, de l'âme et du corps, que je me sentis défaillir, prêt à mourir de peur.

Nous restâmes là jusqu'au matin, incapables de bouger, de dire un mot, crispés dans un affolement indicible.
On n'osa débarricader la sortie qu'en apercevant un mince rayon de jour.
Au pied du mur, près de la porte, le vieux chien était à terre, la gueule fendue d'une balle.
Il était sorti de la cour en creusant un trou sous une palissade."

L'homme au visage pâle se tut ; puis il ajouta :

- "Ce jour-là pourtant, ma vie n'a pas était mis en danger ; mais j'aimerais mieux revivre toutes les heures où j'ai affronté les plus terribles épreuves de ma vie, que la seule minute du coup de fusil du forestier"


La peur:

Merci d'avoir lu.  
                                                                                           ~Frishement Votre
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