Je suis né en l'an 1915, dans la ville d'York, d'une bonne famille, mais étrangère à ce pays-ci. Mon père, natif de Paris, s'établit d'abord à Marseille, où il acquit beaucoup de bien par le négoce, puis, renonçant à celui-ci, s'installa à York et y épousa ma mère.
C'est d'après cette famille, une des meilleures de la région, que je fus appelé Mario Carré. Mais par la corruption de mots communes en Angleterre, on nous appelle Carrey, ou plutôt c'est ainsi que nous nous faisons appeler, ainsi que nous signons, et ainsi que mes compagnons m'appellent depuis toujours.
J'avais deux frères ainés, dont le premier, lieutenant-colonel dans un régiment d'infanterie anglais de l'armée, qui fut tué en bataille. Ce qu'il advint de mon second frère, je ne le sais pas plus que mes parents ne surent ce qu'il advint de moi.
Étant le troisième fils de la famille, j'eus très tôt la tête remplie de pensées vagabondes.
Mon père, qui était fort âgé m'avait donné une éducation aussi convenable que peut l'être celle qu'on dispense à la maison durant la guerre, et me destinait à l'étude des lois. Mais rien ne me plaisait, hormis voyager, et mon désir me poussait si fort contre la volonté et même les ordres de mon père, contre les prières et les sollicitations de ma mère, qu'il semblait y avoir une fatalité dans ce penchant naturel qui m'entrainait tout droit vers ma vie de villageois.
C'est ainsi que je me dirigeai vers Arlington...